Recueillement

Assise dans cette salle impressionnante des prières, Dame Tristane souhaitait un moment de paix afin de faire le point sur ce qui lui était arrivé jusque là.

Elle se revoyait encore enfant, jouant avec son épée de bois confectionnée par son père avec le fils du régisseur du domaine de ses parents.
La petite fille avait grandit...Les choix avaient du se faire non sans douleur pour certains et elle avait quitté ce domaine avec déchirement. Le fils du régisseur, Clévin, dont elle était tombée amoureuse avec les années de cohabitation, ce mariage qu'elle avait fuit plus que tout et la déception qu'elle avait du causer à ses parents.
Comment la fille d'un si grand guerrier, entrainée toute sa jeunesse au combat avait elle pu soudainement partir, se convertir à la non violence et faire le serment de ne plus jamais attaquer aucun seigneur quelqu'il soit...
Peut être à cause des souvenirs trop cruels qu'elle avait des retours de combats de son père où lors de chacun d'entre eux il rentrait avec une ou plusieurs nouvelles blessures, ou peut être un jour il ne rentrerait pas...
Clévin était destiné à cela aussi et elle ne voulait pas revivre ces angoisses et panser continuellement les blessures qui les faisait devenir plus virils et plus hommes encore.
Elle aspirait au calme, à la douceur et au dialogue avant de trouver le dernier recours du combat.

Tristane changea de position sur sa chaise inconfortable et continua ses rêveries.

Ah ma grande te voila bien ! Toi qui vivait en paix, en harmonie avec tes convictions voilà que tu les brises toutes. Le sang coule à nouveau mais par ta lame, avec tes troupes...Comment as tu pu en arriver là ?

L'image de Belitir apparue alors à son esprit....

Bien sur murmura-t-elle Belitir ! Comment ignorer un tel homme. Son charisme l'avait séduite, il se dégageait de lui une telle force qu'elle se sentait aimantée vers lui dès qu'elle se retrouvait en sa présence.

Elle fit une pause, regarda autour d'elle.

Que dois je faire ? Est ce que la route que je prends si tardivement, ce revirement de vie et de route, ne vais je point le regretter? Tant de doutes qui l'assaillaient à l'approche de son union avec ce Roi et elle était deja si confortablement installée au sein de cette guilde...

Tristane se mit à genoux et leva les yeux :

Ô Deesse, toi qui m'a accordé le droit de venir à toi montre moi ma route.
Toi qui a eu la bonté de me faire croiser celui que tu as destiné à être roi, aide moi dans ma quête avant qu'il ne soit trop tard. Aide moi à comprendre pourquoi, illumine moi de ta grâce et apaise mes doutes si nombreux en ces jours tourmentés.

Elle retourna s'asseoir, perdue dans sa contemplation, rongée par le doute.

Le temps n'avait plus d'importance. Elle ne cherchait que la paix. La paix, quel mot qui lui semblait désormais bien loin avec les derniers combats qu'elle avait menés. Eh oui ! Pour l'amour de Lui elle avait rompu ce serment de pacifisme. pour l'amour de Lui elle l'avait suivi dans ses guerres et elle était prête à ressortir son épée et à panser ses blessures, à attendre son retour mais aussi à l'accompagner sur les champs de bataille.
Aussi calme qu'elle puisse être, Tristane cachait un côté bouillonnant et il en fallait de peu que sa rage ne ressorte.

Une douce chaleur l'envahit progressivement. Elle se sentait bien, et elle s'apaisa peu à peu. Les doutes s'envolèrent un à un pour faire place à une certitude. Son choix était le bon. Elle devait l'épouser, autant lui que sa cause. Il était temps de changer de vie et d'arrêter les longues soirées de broderies pour laisser l'amour venir à elle. Elle sentit son coeur se gonfler d'un amour immuable et éternel. Pour Lui. Rien que pour Lui. Et à jamais elle serait près de Lui pour traverser toutes ces épreuves et le soutenir dans tous ces choix. Pas une vie de dévotion mais d'amour et de partage.

Elle se leva, posa humblement un genou à terre :

Ô Déesse ! Merci de ta clairvoyance, de ta bonté et de tes lumières.

Tristane baissa la tête un instant en signe de remerciement et de reconnaissance.

Elle se releva, enfila sa cape et sortit par la Porte d'Or.